Entretiens

« La question des médias est une question démocratique. » 

Pour sa deuxième édition, Médias en Seine voit grand, avec plus d'invités, de conférences, de formats, d'expériences, et ambitionne de s'inscrire comme l'événement international de référence sur la transformation et les médias de demain. Rencontre les co-organisateurs du festival : Corinne Mrejen, DG du groupe Les Echos-Le parisien et Vincent Giret, Directeur de Franceinfo. 

Publié le 25/09/2019 à 14:37, mis à jour le 04/11/2020 à 19:10.

Photo de Corinne Mrejen et Vincent Giret
© Bruno Levy / Christophe Abramowitz

Qu’est-ce qui fait l’originalité du format Médias en Seine ?
Corinne Mrejen : Trois éléments nous distinguent. Tout d’abord, le festival est une coproduction entre deux grands mass médias, un acteur du public, franceinfo, et un acteur du privé le Groupe Les Echos – Le Parisien.
Ensuite, la nature même du contenu proposé mêle deux choses qui sont rarement articulées : l’éditorial d’un côté et la question des modèles économiques de l’autre. Ce n’est pas une remise en cause de l’indépendance éditoriale, c’est une question posée par les nouveaux usages et qu’il faut prendre en compte.
Enfin, les formats des interventions mixent les hauteurs de vue et les réflexions prospectives, lors des conférences et des keynotes, avec des expériences plus concrètes et pratiques durant les ateliers et les masterclasses. 
Cette multiplicité des formats permet de privilégier la co-construction avec le public : nous voulons qu’il soit partie prenante de la discussion et de la réflexion. 

Vincent Giret : C’est très important d’y associer le public. Les médias sont dans une situation historique. Ce sont des acteurs majeurs de l’espace public, ils créent du lien dans des sociétés très fragilisées, où la question du « vivre-ensemble » est très abîmée, et où les démocraties sont entachées par la crise de l’information. C’est un enjeu essentiel pour nos sociétés, de voir si les médias d’information sont capables de créer du lien et de générer de la confiance. La question des médias est une question démocratique. 

C’est la deuxième édition. Affichez-vous de nouvelles ambitions ?
C.M : Nous avons la volonté d’ouvrir les fenêtres, de croiser les expériences, de créer les conditions du dialogue entre les médias, mais aussi de partager nos expériences avec des médias étrangers. Nous avons la conviction que les solutions n’émergeront pas d’un seul côté de l’Atlantique mais dans une collaboration qui dépasse les frontières. Tout le monde doit dialoguer et les solutions émergeront de ce dialogue. 
V.G : Notre ambition, c’est d’inscrire sur la carte à Paris un événement de taille internationale sur la transformation et les médias de demain. Ça n’existe pas. 
L’an dernier, nous avions déjà invité un certain nombre d’intervenants étrangers. L’ambition internationale, ça se construit, ça ne se décrète pas. Mais c’est plus facile lors d’une deuxième édition, de nombreux intervenants de tous les pays ont répondu présents. Cette période spécifique que vivent les médias n’est pas française, elle est mondiale.

Médias en Seine, ce sont deux lieux, deux organisateurs, deux programmations ? Les deux sont-elles complémentaires ?
C.M : Nous avons voulu dépasser la distinction naturelle B2B / B2C, et articuler les problématiques, voire les mêler. Un seul comité éditorial unique a composé le programme, en s’appuyant sur des experts du secteur, en réalisant un sourcing à l’étranger etc. 
V.M : Nos équipes opérationnelles se connaissent très bien et sont totalement convaincues de l’intérêt et de la plus-value de notre alliance. 

Au-delà des thématiques, quelles sont les nouveautés du festival ?
V.G : Cette année, il y a beaucoup d’expériences, avec de la réalité virtuelle et un village de start-up, notamment. 
Les lieux sont différents également. L’Auditorium de Radio France n’était pas ouvert l’an dernier, alors qu’il accueille les conférences de la matinée. Quant au programme dans les locaux des Echos, il court sur toute la journée, contre la seule matinée l’an dernier.
Dans l’ensemble, c’est un moment de réflexion et de débat, mais aussi de rencontres entre les médias l’entertainment, les artistes, les scientifiques…. 

Quelles sont les thématiques abordées, les grands enjeux auxquels sont confrontés les médias ?
C.M : Cinq grandes questions seront abordées et servent de fil conducteur à Médias en Seine :

·        Les nouvelles écritures pour raconter le réel

·        Le défi de la confiance dans les médias

·        Le boom de l’audio, des assistants vocaux et le phénomène autour des podcasts

·        Le challenge de l’intelligence artificielle et la façon dont l’IA est entrée au cœur des rédaction et des médias

·        L’urgence climatique et le rôle des médias. 

Cette question a pris une place prépondérante cette année pour devenir centrale. Quelle est la fonction des médias, comment alerter sans faire peur, trouver le bon ton pour sensibiliser…

V.G : Je rebondis sur les deux premiers points car raconter le réel est devenu un vrai défi pour les médias et cela rejoint la question de la confiance. Les grands récits structurants sont très contestés, l’expertise est perçue comme une domination sociale, voire comme la domination sociale la plus sournoise. Quand on est journaliste, chercheur ou producteur c’est un défi considérable : comment être crédible quand on raconte le réel, comment nos récits induisent de la confiance.
La crise de confiance existe partout mais en France elle est abyssale : seuls 22% des Français disent faire confiance à l’information. C’est un enjeu de taille. Et en même temps, cette situation stimule l’imagination d’une nouvelle génération de journalistes qui ont envie de combattre la désinformation avec de nouveaux outils, et d’instaurer une relation de confiance avec les audiences. 

La diversification, la monétisation des médias semble être aussi un sujet central…
C.M : C’est une question qui irrigue toutes les thématiques. Comment on traite ces sujets via le cœur du réacteur historique, et quel est le modèle économique induit.

Les Echos sont aussi co-organisateur de VivaTech. Voyez-vous des passerelles entre ces deux événements ?
C.M : Les deux événement s’inscrivent dans la même logique : prolonger nos marques au-delà de leur support d’origine, autour des thématiques pour lesquelles nous sommes légitimes.  A chaque fois, nous avons noué des alliances avec des acteurs complémentaires qui nous permettent de nous fixer des ambitions dans les moyens, les développements… Toujours avec la même exigence de qualité. Ces événements sont un moyen d’enrichir nos actifs et de renforcer la relation avec notre public.   

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